mardi 17 janvier 2017

Calfeutrage versus Créationnisme

Murielle SansBornes se remettait tant bien que mal d’un lendemain de veille depuis les deux dernières semaines. Sa cuite favorisait le temps chaud, ce qui, en décembre, signifiait que l’appartement arborait un 45 degrés tropical à l’ombre. Heureusement, la Société Électrique qui desservait son logis se faisait un devoir de complaire. La soirée précédente fut longue, puisqu’elle dut remplacer les coupes de vin convoitées par une série de capsules d’ibuprofène, seule solution lui permettant d’affronter la lumière glauque de ses appartements privées. Lorsque les décoctions médicinales cessaient leur effet bénéfique, son corps se convulsait avec grâce, expulsant adroitement un café frais, signe innommable de jours meilleurs.
Le changement de la garde n’avait aidé d’aucune façon la situation funeste qu’avait soudainement pris sa vie professionnelle. En effet, malgré son doctorat en langues pré-Ayurvédiques et son BAC en danse contemporaine, sa chaire à la Sorbonne en Anthropologie mixte et appliquée fut révoquée suite à son entêtement à publier, innocemment peut-être, d’interminables articles érudits sur le calfeutrage préhistorique retrouvé en Palestine sous les décombres d’un temple précolombien aux allures vaguement et ministériellement mégalithique.
Son directeur ne pouvait accepter que la masse des créationnistes de tout acabit se rebellent publiquement, rétorquant lui-même avec indignation que seul le Créateur pouvait être responsable d’un calfeutrage de telle qualité. La datation proposée de 100 000 ans avant l’ère moderne ne le faisait guère sourciller, le temps étant malléable après tout.

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