mercredi 31 octobre 2018

Edmond Rotule ou l'Avis devant Soi

Il s'en fallut de peu. Au sortir d'une conversation navrante, Edmond Rotule, 21 ans, se vit varloppé à fond de train par une rutilante voiture de provenance Européenne lorsqu'il traversait la rue de façon freluquette et inopinée. Il avait tout de même de la chance, car s'il s'était fait embouter par un train à fond de voiture, nous n'en serions pas là (et lui non plus, d'ailleurs).

Au sortir de cette expérience fortuite qui lui laissait la vie sauve, sauf pour plusieurs mouvements qui lui seraient maintenant refusés pour le reste de ses jours, il se retrouvait seul sur le trottoir, vertical et immobile (ce serait dorénavant sa seule position possible), attendant un taxi (préférablement de modèle Lamborghini) et se demandant ce qu'il pourrait faire pour amoindrir son manque de mobilité si durement acquis.

Une aide gouvernementale aux jeunes écervelés de ce monde lui permit de se procurer aux frais de l'état une paire de patins à roulettes électriques (indice de carbone: zéro) contrôlée par ses impulsions cérébrales. Les piles inclassables émmental-sodium avaient une durée de vie quasi illimitée, ce qui rendait ses déplacements plutôt enivrants, vu la vélocité avec laquelle il se déplaçait sans soucis de ravitaillements électrophages inopportuns. Une fois l'équilibre précaire apprivoisée, le monde Mégalopolitain était maintenant littéralement sous ses pieds (et pour cause).

Ce soir-là, repus de promenades interminables au travers de la mégalopole, chemin faisant, Edmond eut l'idée de donner un répit à ses patins et décida d'emprunter le Métro dont le dernier train était sur le point de partir, en ce samedi soir d'été. Sa position stationnaire verticale ne lui permettait cependant pas d'emprunter les escaliers comme bon lui semble (ni comme tout le monde). Il était cantonné à l'utilisation furtive des escaliers mécaniques sur un parcours de quatre étages s'il voulait se rendre à la plateforme d'embarquement.

Il faisait sombre dans la descente et il espérait que la rareté de congénères métrophiles n'était point une indication qu'il venait de manquer le dernier train de la soirée. Soudainement, le mouvement de l'escalier mobile s'interrompit, le laissant au beau milieu de l'étage trois, en direction du tunnel sud-ouest. Une voix du système de communication du Métro informa les usagers qu'en raison d'un conflit de travail irrésolu, le système ferroviaire sous-terrain serait fermé jusqu'à nouvel ordre, moyennant résolution du conflit. Le message se termina par l'usuel "Merci d'avoir voyagé avec le Service Ferroviaire Mégapolitrain". La fermeture éventuelle des lumières des tunnels finirent par lui faire comprendre à quel point le service à la clientèle ne pourrait l'aider en ce moment.

dimanche 28 octobre 2018

Garrot-Poulet
(Titre illégitime)

Il était une fois dans une contrée lointaine, un abris-bus marbré rappelant la mer de par sa surface calme et lisse.
Autres parts, dans des endroits tout aussi fascinant mais moins français, c’était la galère et les gens ne cherchaient qu’à se la couler douce en écoutant un peu de télé avant de sombrer dans une inconscience soporifique altière, surpeuplée de rêves et cherchant une fuite aux lendemains prétendument meilleurs.
Élevant leur voix chaque matin dès l’aurore, la masse byzantine se ruait vers des chaussés inégales (parfois même vers des rails policés) avant d’être emporté par des engins mobiles destinés à les transporter avec rapidité vers des endroits jonchés de boîtes vitrés de grandeur mixte où tous un chacun devait passer de lasses journées à scruter l’inertie temporelle qui, malgré leur déjection, finissaient par garnir leur garde-monnaie à chaque quinzaine.
Plusieurs appareils de la plus haute et plus essentielle technologie garnissaient en rangs étroits et serrés les cubes habitables, destinés à aider la masse à accomplir la tâche quotidienne dont le but ultime échappait à plus d’un et qui de surcroît était incompréhensible pour la majorité.
Ce jour-là, une onomatopée tardive fit déborder le vase chancelant de l’équilibre international. Au loin, un bruit sourd anéantit la moitié voilée du globe qui faisait alors dos au soleil. Les journaux du soir s’entêtaient à crier en première page que la faute revenait aux autres, mais il était trop tard, il n’y avait déjà plus personne pour les lire.